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Le Cheval d'Orgueil - Per-Jakez Hélias
Fiche de lecture :<o:p></o:p>
Le Cheval dOrgueil Per-Jakez Helias<o:p></o:p>
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Lauteur :<o:p></o:p>
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Pierre-Jakez Hélias (1914-1995) est né dans le Finistère, à Pouldreuzic en Pays Bigouden. Fils de paysans bretonnant, il a dabord parlé breton avant dapprendre le Français à lécole. Lycéen à Quimper puis étudiant en Lettres Supérieures à Rennes, il devient professeur de 1946 à 1975 et enseigne les humanités classiques.
Après la Seconde Guerre Mondiale, Hélias est chargé danimer des émissions en breton à la radio. Ecrivain prolifique, il participera à de nombreuses créations littéraires, que ce soit pour le théâtre, la radio, le roman ou la poésie. On lui doit notamment le célèbre Festival de Cornouaille de Quimper et de nombreux ouvrages (le plus souvent écrit en breton avant dêtre traduit en français par lauteur lui-même). Attaché à la culture bretonne mais aussi à la langue française du fait de sa profession, il sera très critiqué par les nationalistes bretons qui refusent toute collaboration avec les institutions françaises.
Son uvre majeure, dun intérêt éthnologique considérable, restera le Cheval dOrgueil qui le rendra célèbre en 1975. Il sera notamment au cinéma par le cinéaste Claude Chabrol. Mais ce succès lui attirera également les critiques dintellectuels bretons (notamment le journaliste et poète Xavier Grall) qui lui reprocheront de peindre une vision trop passéiste de la Bretagne.
Toujours est-il que Pierre-Jakez Hélias restera probablement lun des plus grands écrivains bretons du XXème siècle.
Résumé :<o:p></o:p>
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Le Cheval dOrgueil est le récit de lenfance de lauteur. Il est né en 1914 à Pouldreuzic dans le Finistère, dans un « pays » situé au sud-est de Quimper : le Pays Bigouden.
Ses parents sont de pauvres paysans qui nont pas pu atteindre le certificat détude. Le grand-père paternel, sabotier de profession, était trop pauvre pour assurer léducation de ses enfants. Mais il était bon travailleur et nourrissait convenablement sa famille, lui épargnant la « Chienne de Vie », incarnation de la misère. Quant à la mère de lauteur, elle sest retrouvée à douze ans en charge de ses jeunes frères et surs après le décès de sa propre mère. A douze ans, elle devait remplacer sa propre mère, assurant le travail quotidien normalement réservé à a femme adulte : nourrir lunique cochon de la famille, traire lunique vache, préparer le petit-déjeuner pour ses frère et surs, aller les lever, les envoyer à lécole, emmener la vache au champ qui était généralement loin, revenir en tricotant, faire le ménage, laver les vêtements, préparer le repas du midi, retourner au champ en tricotant, travailler la terre, revenir avec la vache et avec faix dherbe sur le dos ou un panier à la main, soccuper de ses frères, leur faire faire leurs devoirs, gaver à nouveau le cochon, traire une nouvelle fois la vache, préparer le repas du soir, faire la vaisselle et attendre que tout le monde soit couché en continuant son tricot.
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Les habitants du village de Pouldreuzic ne vivent pas dans de grandes maisons et généralement ne sont que locataires. Rares et chanceux sont ceux qui possédent leur propre maison. Les parents de Perig (« Petit Pierre » en breton, surnom donné à lauteur quand il était enfant) pouvaient se vanter dêtre propriétaire de leur habitation, mais il leur était nécessaire den louer une partie pour avoir un revenu supplémentaire. Le cochon, la vache et les poules crèchent dans la maison. Les poules ont lhabitude de nicher au-dessus de lentrée et prennent un malin plaisir à graisser les chapeaux mais épargnent curieusement les coiffes des femmes.
Perig a six mois quand la guerre est déclarée. Celle-ci le sépare de son père, cest son grand-père Alain Le Goff qui se chargera de son éducation avant quil nentre à lécole. Savant et conteur renommé, Alain Le Goff fait découvrir la vie à son petit-fils à travers jeux, comptines et histoires légendaires. Cet enseignement peut paraître plus un jeu quautre chose, mais lélève se retrouve à devoir élucider seul les énigmes que lui impose son grand-père. Car il faut que lenfant soit capable daffronter seul les difficultés de la vie, et les conseils du grand-père ainsi que ses défis sont autant dexpériences et doutils pour devenir un homme et rester fier quoique la vie puisse réserver. Et il sagit aussi de ne pas être ridicule quand lheure arrivera daller à lécole et dapprendre le Français.
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Il nest pas question de dépenser les rares sous de la famille pour trouver un « médecin de papier » en cas de problème de santé : il existe une multitude de saints protecteurs dans la région qui guérissent tous dun mal spécifique. Tel saint soigne les dents, tel autre rend la vue, celui-ci guérit de la claudication, celui-là des maux de ventre. Chaque famille se rend régulièrement à telle ou telle église où se trouve des fontaines dont leau à des vertus unanimement reconnues. Que peut la science dun « médecin de papier » contre le pouvoir sacré des saints ? Et pour presque chaque mal de la vie de tous les jours, il existe des remèdes ancestraux qui sont « évidemment » plus efficace que ces médicaments coûteux que prescrivent les médecins. Que ce soit avec de lurine, de la bave de limace ou du jus de rhubarbe, il existe toujours un moyen de soigner les plaies ou les otites.
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La religion prend une place importante dans la vie de tous les jours. Les enfants doivent aller au catéchisme histoire de suivre une éducation chrétienne. Toutes les familles se rendent à la messe le dimanche sous peine de subir les railleries des villageois. Les enfants et les femmes assistent même aux vêpres (la messe du soi), les hommes eux sen dispensent pour la plupart. Le prêtre et le recteur font office dautorité au village et ont énormément dinfluence, notamment sur les femmes.
Lorsquun habitant vient à mourir, des hommes proches du défunt font le tour de la paroisse pour annoncer la nouvelle, des télégrammes sont envoyés aux membres de la famille géographiquement éloignés, sauf à ceux que lon sait trop pauvres : le voyage leur coûterait trop cher et la nouvelle sajouteraient aux malheurs qui les accablent déjà (parce quils ne sont pas aidés par la vie, les plus pauvres ont le droit à un plus grand respect). Les villageois se réunissent et se relaient auprès du cadavre le temps que lon procède à lenterrement : cest la veillée. On fait appel à un laïc pour rendre grâce au défunt, cest le diseur de Grâces. Toute la communauté se rend aux funérailles, les absents ont le droit aux reproches. On peut sêtre fâché avec le défunt du temps de son vivant, mais le jour de son enterrement on se doit de lui rendre honneur.
Lannée est rythmée par les pardons. Le pardon est une fête annuelle du saint éponyme dune église ou dune chapelle. Il y a ainsi autant de pardons que de chapelle, mais certains occupent une place plus importante que dautres. Le plus important est celui de Saint Anne de la Palud qui se trouve au nord (au bord de la baie de Douarnenez, à mi-chemin entre Douarnenez et Châteaulin). Les Bigoudens y vont à pied, ce qui fait un relativement long périple. Le pardon incontournable au Pays Bigouden est celui de Notre-Dame de Penhors. On y porte de lourdes bannières dune église à lautre (de grandes bannières pour les hommes, des petites pour les femmes) et des brancards sur lesquels repose la statue du saint vénéré ou de la Vierge. Au bord de la falaise, le prêtre effectue la bénédiction de la mer. De retour à la chapelle les fidèles assistent à la messe. Les mendiants profitent du pardon pour demander laumône, des romanichels déploient leurs boutiques ambulantes et proposent des jeux de force.
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Bien plus que pour dautres enfants de France, lentrée à lécole est un passage décisif pour les enfants de Basse-Bretagne. En effet, il sagit pour eux du premier contact avec la langue française. Jusquici ils nont pu parlé que la langue de leurs parents, c'est-à-dire le Breton. Seuls les anciens combattants et certaines « grosses têtes » du village parlent le Français. Mais lapprentissage de cette nouvelle langue ne se fait pas sans peine. Le maître décole nhésite pas à punir quiconque emploierait un mot breton à lécole. Toutes les ruses sont permises pour punir les bretonnants réfractaires, et notamment celle de « la vache ». Il sagit dun objet que les élèves passent à chaque élève prononçant un mot de breton. Celui qui détient « la vache » à la fin de la journée est puni. Pour les élèves, il sagit dune véritable torture, dautant plus sournoise que les instituteurs nhésitent pas à converser en breton avec les parents.
Avec lécole apparaît une division importante au sein de la communauté qui voit saffronter les Blancs contre les Rouges. Les Rouges sont les républicains qui sont pour lécole, les Blancs sont fidèles au recteur de la paroisse pour qui lécole de la République est lécole du Diable. Les Blancs nhésitent pas à envoyer leurs filles à lécole des surs, mais les fils ne peuvent éviter lécole publique car il nexiste pas dans la paroisse décole privée pour garçons. Si cette rivalité entre Blancs et Rouges est en temps normal mise de côté, les oppositions renaissent lors des périodes électorales. Les Blancs ont pour guide le recteur, les Rouges soutiennent Monsieur Le Bail, maire radical de Plozévet. Les Blancs qui sont pour lEglise et le Breton accusent les Rouges dêtre des antéchrists. Les Rouges sont généralement plus pauvres, vont quand même à la messe tous les dimanches et sont pour lapprentissage du Français. Si les Rouges veulent parler Français, cest quils souffrent dun complexe dinfériorité face aux bourgeois de la ville. En effet pour les Quimpérois, être bretonnant est synonyme dêtre pauvre. Ainsi quand Perig passe son baccalauréat, les mères qui ne parlent pas français nassistent pas à la remise des diplômes malgré linsistance des directeurs : ceux qui parlent français sont dun autre monde que le leur, elles ne seraient pas à leur place avec eux.
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Au cours de leur enfance, les enfants bigoudens soccupent à divers jeux. De la fabrication de pistolets à partir de branches de sureau à la conceptions de toupies à partir de morceaux de buis. Aucun jouet nest acheté, tout est fabriqué par les enfants eux même. Il existe également une hiérarchie au sein de la communauté des enfants. Régulièrement, les plus vieux lancent aux plus jeunes des défis à relever, que ce soit grimper à la cime dun arbre pour y déloger un nid ou ramper dans un tunnel à moitié obstrué par de la boue. Il est alors vital pour chaque jeune bigouden de réussir à faire face à ces difficultés et de sen sortir sans abandon et sans laide dun adulte. Ces occupations peuvent tout aussi bien être individuelles que collective, mais que ce soit la chasse aux grillons où même la course de cerceaux, lobjectif est toujours de faire mieux que les autres. Ce genre dactivité ne plaisent pas au parents, mais ceux-ci suivent néanmoins de loin la progression de leur progéniture : ce ne sont pas de simples jeux mais de véritables rites dinitiation, un enfant qui ne fait pas preuve de suffisamment de courage devient source de honte pour la famille. De plus, ce ne sont pas à proprement parler, de jeux : lenfant de la campagne ne joue pas, mais apprend en samusant. Il sagit dun apprentissage qui lui permet dacquérir les gestes et les attitudes pour devenir un homme, un vrai paysan. Et tant que lenfant na pas fumé du tabac de singe, il restera toujours dans le monde des enfants, car cette dernière épreuve est létape sine qua non pour devenir un homme.
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Les parents de Per-Jakez, comme la plupart des autres ménages du Pays Bigouden, sont pauvre, mais nen souffrent pas. Ils se satisfont de leur situation, ne vivant ni dans lopulence, ni dans le besoin. Mais la « Chienne de vie » guette, toutes les familles savent quil suffirait dun coup du sort pour tomber dans la misère. Un incendie suffit à passer du statut de paysan à celui de mendiant. Les pauvres ont le droit au respect des autres membres de la communauté, mais nen demeure pas moins à lécart. Quand la misère guette, beaucoup noient leurs soucis dans la boisson.
Mais la vie du paysan est loin dêtre tranquille. Entre la Saint Jean et la Toussaint, le travail se fait rude. Les moissons se font encore pendant un bon moment exclusivement à la main. Il sagit dun travail de forçats où autant les organismes des femmes que ceux des hommes sont mis à rude épreuve. Le peurzorn (le repas de fin de battage) vient récompenser les travailleurs à la fin de la journée. Tout le monde est réuni autour de la table, les plus humbles côtoient les « grosses têtes », il ny a plus de hiérarchie, chacun est légal de lautre. Les ramassages de pommes et de pommes de terre sajoutent aux moissons. Pendant la belle saison, il ny a pas un instant de répit.
Les choses saméliorent avec larrivée de lhiver. Les jours se raccourcissent et le travail se fait plus rare. Mais cest aussi lépoque où le moral est mis à mal, où la misère se fait plus proche, où la nourriture peut venir à manquer si lété na pas été bon. La vie est difficile tout au long de lannée, mais cest le lot quotidien du paysan.
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Pour lhomme qui trime aux champs, le repas est une bénédiction. Lévènement incontournable au village est quand on tue le cochon. Alerté par les cris de lanimal, tout le village vient assister au découpage de la viande. La viande est la nourriture par excellence du paysan bigouden, et le cochon est la viande par excellence. Le propriétaire du cochon abattu convie ses voisins et sa famille à la fête du cochon où lon déguste la « viande douce » (fraîche, qui nest pas salée). Le reste du cochon est conservé dans de la saumure et sera peu à peu consommé sous forme de lard salé. A coté de cela, les poissons et en particulier les fruits de mer ne sont pas appréciés. On ne mange le poisson quau carême, et les crabes et les langoustines finissent généralement au fumier tellement on répugne lodeur qui se dégage de la cuisson. Quand aux huîtres, qui pourrait avoir la folie de vouloir avaler des cailloux ? Mais, que ce soit du pain, de la soupe, des pommes de terre au lait, des galettes ou le café-pain-beurre de quatre heures, la nourriture est lune des choses les plus importante chez les Bigoudens car cest ce qui donne la santé au travailleur. Il sagit également dun facteur damitié, car il ny a pas de plus belle preuve damitié que doffrir à manger et à boire à un proche ou un voisin.
NB : il manque ici le résumé de l'ultime chapitre qui sera ajouté ultérieurementApports et limites :<o:p></o:p>
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Le Cheval dOrgueil est la peinture dun monde presque totalement disparu et oublié mais qui nest pourtant pas si lointain, longtemps marginalisé par les sociologues et les historiens. Lauteur tire ses informations de sa propre expérience ce qui explique la richesse de luvre. Mais Pierre-Jakez Hélias manque aussi de recul face à cette société. Parce quil en est très attaché et en éprouve une certaine nostalgie, il ne peut avoir quune vision plus ou moins subjective. Cest pourquoi il ne cherche pas à enseigner, il nous transmet son expérience, en sabstenant de toute analyse. Des intellectuels, et notamment Xavier Grall dans le Cheval couché, ont critiqué cet attachement à une vision de la Bretagne jugée trop passéiste. La publication du Cheval dOrgueil intervient en effet dans la seconde moitié du XXème siècle, en plein renouveau de la Bretagne qui alors cherche à rattraper son retard économique et à promouvoir une image de région dynamique.<o:p></o:p>
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