• Fiche de lecture :<o:p></o:p>

    Le Cheval d’Orgueil – Per-Jakez Helias<o:p></o:p>

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    L’auteur :<o:p></o:p>

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             Pierre-Jakez Hélias (1914-1995) est né dans le Finistère, à Pouldreuzic en Pays Bigouden. Fils de paysans bretonnant, il a d’abord parlé breton avant d’apprendre le Français à l’école. Lycéen à Quimper puis étudiant en Lettres Supérieures à Rennes, il devient professeur de 1946 à 1975 et enseigne les humanités classiques.

                Après la Seconde Guerre Mondiale, Hélias est chargé d’animer des émissions en breton à la radio. Ecrivain prolifique, il participera à de nombreuses créations littéraires, que ce soit pour le théâtre, la radio, le roman ou la poésie. On lui doit notamment le célèbre Festival de Cornouaille de Quimper et de nombreux ouvrages (le plus souvent écrit en breton avant d’être traduit en français par l’auteur lui-même). Attaché à la culture bretonne mais aussi à la langue française du fait de sa profession, il sera très critiqué par les nationalistes bretons qui refusent toute collaboration avec les institutions françaises.

                Son œuvre majeure, d’un intérêt éthnologique considérable, restera le Cheval d’Orgueil qui le rendra célèbre en 1975. Il sera notamment au cinéma par le cinéaste Claude Chabrol. Mais ce succès lui attirera également les critiques d’intellectuels bretons (notamment le journaliste et poète Xavier Grall) qui lui reprocheront de peindre une vision trop passéiste de la Bretagne.

    Toujours est-il que Pierre-Jakez Hélias restera probablement l’un des plus grands écrivains bretons du XXème siècle.


    Résumé :<o:p></o:p>

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             Le Cheval d’Orgueil est le récit de l’enfance de l’auteur. Il est né en 1914  à Pouldreuzic dans le Finistère, dans un « pays » situé au sud-est de Quimper : le Pays Bigouden.

    Ses parents sont de pauvres paysans qui n’ont pas pu atteindre le certificat d’étude. Le grand-père paternel, sabotier de profession, était trop pauvre pour assurer l’éducation de ses enfants. Mais il était bon travailleur et nourrissait convenablement sa famille, lui épargnant la « Chienne de Vie », incarnation de la misère. Quant à la mère de l’auteur, elle s’est retrouvée à douze ans en charge de ses jeunes frères et sœurs après le décès de sa propre mère. A douze ans, elle devait remplacer sa propre mère, assurant le travail quotidien normalement réservé à a femme adulte : nourrir l’unique cochon de la famille, traire l’unique vache, préparer le petit-déjeuner pour ses frère et sœurs, aller les lever, les envoyer à l’école, emmener la vache au champ qui était généralement loin, revenir en tricotant, faire le ménage, laver les vêtements, préparer le repas du midi, retourner au champ en tricotant, travailler la terre, revenir avec la vache et avec faix d’herbe sur le dos ou un panier à la main,  s’occuper de ses frères, leur faire faire leurs devoirs, gaver à nouveau le cochon, traire une nouvelle fois la vache, préparer le repas du soir, faire la vaisselle et attendre que tout le monde soit couché en continuant son tricot.

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    Les habitants du village de Pouldreuzic ne vivent pas dans de grandes maisons et généralement ne sont que locataires. Rares et chanceux sont ceux qui possédent leur propre maison. Les parents de Perig (« Petit Pierre » en breton, surnom donné à l’auteur quand il était enfant) pouvaient se vanter d’être propriétaire de leur habitation, mais il leur était nécessaire d’en louer une partie pour avoir un revenu supplémentaire. Le cochon, la vache et les poules crèchent dans la maison. Les poules ont l’habitude de nicher au-dessus de l’entrée et prennent un malin plaisir à graisser les chapeaux mais épargnent curieusement les coiffes des femmes.

    Perig a six mois quand la guerre est déclarée. Celle-ci le sépare de son père, c’est son grand-père Alain Le Goff qui se chargera de son éducation avant qu’il n’entre à l’école. Savant et conteur renommé, Alain Le Goff fait découvrir la vie à son petit-fils à travers jeux, comptines et histoires légendaires. Cet enseignement peut paraître plus un jeu qu’autre chose, mais l’élève se retrouve à devoir élucider seul les énigmes que lui impose son grand-père. Car il faut que l’enfant soit capable d’affronter seul les difficultés de la vie, et les conseils du grand-père ainsi que ses défis sont autant d’expériences et d’outils pour devenir un homme et rester fier quoique la vie puisse réserver. Et il s’agit aussi de ne pas être ridicule quand l’heure arrivera d’aller à l’école et d’apprendre le Français.

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    Il n’est pas question de dépenser les rares sous de la famille pour trouver un « médecin de papier » en cas de problème de santé : il existe une multitude de saints protecteurs dans la région qui guérissent tous d’un mal spécifique. Tel saint soigne les dents, tel autre rend la vue, celui-ci guérit de la claudication, celui-là des maux de ventre. Chaque famille se rend régulièrement à telle ou telle église où se trouve des fontaines dont l’eau à des vertus unanimement reconnues. Que peut la science d’un « médecin de papier » contre le pouvoir sacré des saints ? Et pour presque chaque mal de la vie de tous les jours, il existe des remèdes ancestraux qui sont « évidemment » plus efficace que ces médicaments coûteux que prescrivent les médecins. Que ce soit avec de l’urine, de la bave de limace ou du jus de rhubarbe, il existe toujours un moyen de soigner les plaies ou les otites.

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    La religion prend une place importante dans la vie de tous les jours. Les enfants doivent aller au catéchisme histoire de suivre une éducation chrétienne. Toutes les familles se rendent à la messe le dimanche sous peine de subir les railleries des villageois. Les enfants et les femmes assistent même aux vêpres (la messe du soi), les hommes eux s’en dispensent pour la plupart. Le prêtre et le recteur font office d’autorité au village et ont énormément d’influence, notamment sur les femmes.

    Lorsqu’un habitant vient à mourir, des hommes proches du défunt font le tour de la paroisse pour annoncer la nouvelle, des télégrammes sont envoyés aux membres de la famille géographiquement éloignés, sauf à ceux que l’on sait trop pauvres : le voyage leur coûterait trop cher et la nouvelle s’ajouteraient aux malheurs qui les accablent déjà (parce qu’ils ne sont pas aidés par la vie, les plus pauvres ont le droit à un plus grand respect). Les villageois se réunissent et se relaient auprès du cadavre le temps que l’on procède à l’enterrement : c’est la veillée. On fait appel à un laïc pour rendre grâce au défunt, c’est le diseur de Grâces. Toute la communauté se rend aux funérailles, les absents ont le droit aux reproches. On peut s’être fâché avec le défunt du temps de son vivant, mais le jour de son enterrement on se doit de lui rendre honneur.

    L’année est rythmée par les pardons. Le pardon est une fête annuelle du saint éponyme d’une église ou d’une chapelle. Il y a ainsi autant de pardons que de chapelle, mais certains occupent une place plus importante que d’autres. Le plus important est celui de Saint Anne de la Palud qui se trouve au nord (au bord de la baie de Douarnenez, à mi-chemin entre Douarnenez et Châteaulin). Les Bigoudens y vont à pied, ce qui fait un relativement long périple. Le pardon incontournable au Pays Bigouden est celui de Notre-Dame de Penhors. On y porte de lourdes bannières d’une église à l’autre (de grandes bannières pour les hommes, des petites pour les femmes) et des brancards sur lesquels repose la statue du saint vénéré ou de la Vierge. Au bord de la falaise, le prêtre effectue la bénédiction de la mer. De retour à la chapelle les fidèles assistent à la messe. Les mendiants profitent du pardon pour demander l’aumône, des romanichels déploient leurs boutiques ambulantes et proposent des jeux de force.

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    Bien plus que pour d’autres enfants de France, l’entrée à l’école est un passage décisif pour les enfants de Basse-Bretagne. En effet, il s’agit pour eux du premier contact avec la langue française. Jusqu’ici ils n’ont pu parlé que la langue de leurs parents, c'est-à-dire le Breton. Seuls les anciens combattants et certaines « grosses têtes » du village parlent le Français. Mais l’apprentissage de cette nouvelle langue ne se fait pas sans peine. Le maître d’école n’hésite pas à punir quiconque emploierait un mot breton à l’école. Toutes les ruses sont permises pour punir les bretonnants réfractaires, et notamment celle de « la vache ». Il s’agit d’un objet que les élèves passent à chaque élève prononçant un mot de breton. Celui qui détient « la vache » à la fin de la journée est puni. Pour les élèves, il s’agit d’une véritable torture, d’autant plus sournoise que les instituteurs n’hésitent pas à converser en breton avec les parents.

                Avec l’école apparaît une division importante au sein de la communauté qui voit s’affronter les Blancs contre les Rouges. Les Rouges sont les républicains qui sont pour l’école, les Blancs sont fidèles au recteur de la paroisse pour qui l’école de la République est l’école du Diable. Les Blancs n’hésitent pas à envoyer leurs filles à l’école des sœurs, mais les fils ne peuvent éviter l’école publique car il n’existe pas dans la paroisse d’école privée pour garçons. Si cette rivalité entre Blancs et Rouges est en temps normal mise de côté, les oppositions renaissent lors des périodes électorales. Les Blancs ont pour guide le recteur, les Rouges soutiennent Monsieur Le Bail, maire radical de Plozévet. Les Blancs qui sont pour l’Eglise et le Breton accusent les Rouges d’être des antéchrists. Les Rouges sont généralement plus pauvres, vont quand même à la messe tous les dimanches et sont pour l’apprentissage du Français. Si les Rouges veulent parler Français, c’est qu’ils souffrent d’un complexe d’infériorité face aux bourgeois de la ville. En effet pour les Quimpérois, être bretonnant est synonyme d’être pauvre. Ainsi quand Perig passe son baccalauréat, les mères qui ne parlent pas français n’assistent pas à la remise des diplômes malgré l’insistance des directeurs : ceux qui parlent français sont d’un autre monde que le leur, elles ne seraient pas à leur place avec eux.

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                Au cours de leur enfance, les enfants bigoudens s’occupent à divers jeux. De la fabrication de pistolets à partir de branches de sureau à la conceptions de toupies à partir de morceaux de buis. Aucun jouet n’est acheté, tout est fabriqué par les enfants eux même. Il existe également une hiérarchie au sein de la communauté des enfants. Régulièrement, les plus vieux lancent aux plus jeunes des défis à relever, que ce soit grimper à la cime d’un arbre pour y déloger un nid ou ramper dans un tunnel à moitié obstrué par de la boue. Il est alors vital pour chaque jeune bigouden de réussir à faire face à ces difficultés et de s’en sortir sans abandon et sans l’aide d’un adulte. Ces occupations peuvent tout aussi bien être individuelles que collective, mais que ce soit la chasse aux grillons où même la course de cerceaux, l’objectif est toujours de faire mieux que les autres. Ce genre d’activité ne plaisent pas au parents, mais ceux-ci suivent néanmoins de loin la progression de leur progéniture : ce ne sont pas de simples jeux mais de véritables rites d’initiation, un enfant qui ne fait pas preuve de suffisamment de courage devient source de honte pour la famille. De plus, ce ne sont pas à proprement parler, de jeux : l’enfant de la campagne ne joue pas, mais apprend en s’amusant. Il s’agit d’un apprentissage qui lui permet d’acquérir les gestes et les attitudes pour devenir un homme, un vrai paysan. Et tant que l’enfant n’a pas fumé du tabac de singe, il restera toujours dans le monde des enfants, car cette dernière épreuve est l’étape sine qua non pour devenir un homme.

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                Les parents de Per-Jakez, comme la plupart des autres ménages du Pays Bigouden, sont pauvre, mais n’en souffrent pas. Ils se satisfont de leur situation, ne vivant ni dans l’opulence, ni dans le besoin. Mais la « Chienne de vie » guette, toutes les familles savent qu’il suffirait d’un coup du sort pour tomber dans la misère. Un incendie suffit à passer du statut de paysan à celui de mendiant. Les pauvres ont le droit au respect des autres membres de la communauté, mais n’en demeure pas moins à l’écart. Quand la misère guette, beaucoup noient leurs soucis dans la boisson.

                Mais la vie du paysan est loin d’être tranquille. Entre la Saint Jean et la Toussaint, le travail se fait rude. Les moissons se font encore pendant un bon moment exclusivement à la main. Il s’agit d’un travail de forçats où autant les organismes des femmes que ceux des hommes sont mis à rude épreuve. Le peurzorn (le repas de fin de battage) vient récompenser les travailleurs à la fin de la journée. Tout le monde est réuni autour de la table, les plus humbles côtoient les « grosses têtes », il n’y a plus de hiérarchie, chacun est l’égal de l’autre. Les ramassages de pommes et de pommes de terre s’ajoutent aux moissons. Pendant la belle saison, il n’y a pas un instant de répit.

    Les choses s’améliorent avec l’arrivée de l’hiver. Les jours se raccourcissent et le travail se fait plus rare. Mais c’est aussi l’époque où le moral est mis à mal, où la misère se fait plus proche, où la nourriture peut venir à manquer si l’été n’a pas été bon. La vie est difficile tout au long de l’année, mais c’est le lot quotidien du paysan.

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    Pour l’homme qui trime aux champs, le repas est une bénédiction. L’évènement incontournable au village est quand on tue le cochon. Alerté par les cris de l’animal, tout le village vient assister au découpage de la viande. La viande est la nourriture par excellence du paysan bigouden, et le cochon est la viande par excellence. Le propriétaire du cochon abattu convie ses voisins et sa famille à la fête du cochon où l’on déguste la « viande douce » (fraîche, qui n’est pas salée). Le reste du cochon est conservé dans de la saumure et sera peu à peu consommé sous forme de lard salé. A coté de cela, les poissons et en particulier les fruits de mer ne sont pas appréciés. On ne mange le poisson qu’au carême, et les crabes et les langoustines finissent généralement au fumier tellement on répugne l’odeur qui se dégage de la cuisson. Quand aux huîtres, qui pourrait avoir la folie de vouloir avaler des cailloux ? Mais, que ce soit du pain, de la soupe, des pommes de terre au lait, des galettes ou le café-pain-beurre de quatre heures, la nourriture est l’une des choses les plus importante chez les Bigoudens car c’est ce qui donne la santé au travailleur. Il s’agit également d’un facteur d’amitié, car il n’y a pas de plus belle preuve d’amitié que d’offrir à manger et à boire à un proche ou un voisin.


    NB : il manque ici le résumé de l'ultime chapitre qui sera ajouté ultérieurement


    Apports et limites :<o:p></o:p>

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                Le Cheval d’Orgueil est la peinture d’un monde presque totalement disparu et oublié mais qui n’est pourtant pas si lointain, longtemps marginalisé par les sociologues et les historiens. L’auteur tire ses informations de sa propre expérience ce qui explique la richesse de l’œuvre. Mais Pierre-Jakez Hélias manque aussi de recul face à cette société. Parce qu’il en est très attaché et en éprouve une certaine nostalgie, il ne peut avoir qu’une vision plus ou moins subjective. C’est pourquoi il ne cherche pas à enseigner, il nous transmet son expérience, en s’abstenant de toute analyse. Des intellectuels, et notamment Xavier Grall dans le Cheval couché, ont critiqué cet attachement à une vision de la Bretagne jugée trop passéiste. La publication du Cheval d’Orgueil intervient en effet dans la seconde moitié du XXème siècle, en plein renouveau de la Bretagne qui alors cherche à rattraper son retard économique et à promouvoir une image de région dynamique.<o:p></o:p>


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  • Dissertation:

     

    NB : S'agissant d'une dissertation d'un étudiant (et non pas d'un philosophe ou professeur de philosophie), je vous conseille de prendre du recul vis-à-vis de ma "production". Si le coeur vous en dit, vous pouvez réagir et faire votre propre réflexion, je me ferai un plaisir de la publier.


    La culture est-elle la nature de l'homme ?


               La culture est-elle la nature de l’homme ? Est-ce par la culture que l’homme est ce qu’il est ? Cette question peut à première vue avoir une réponse évidente : ce qui nous distingue de l’animal, c’est notre culture, et tout homme qui ne ferait apparaître aucune forme de culture serait considéré comme barbare, sauvage voire animal. Pourtant, par leur définition, culture et nature abordent deux notions contradictoires. Ce qui est naturel, est donné à la naissance, la nature de l’homme est donc ce qui dès sa naissance fait qu’il n’est autre chose que ce qu’il est. La culture au contraire est quelque chose qui s’obtient par le travail de l’homme, c’est ce qu’il ajoute à ce qu’il est en naissant, c'est-à-dire sa nature. Comment peut-on alors qualifier de nature humaine, ce que l’homme obtient par le travail ? Ce qui s’acquiert ou qui est acquis peut-il être inné ?<o:p></o:p>

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                La culture n’est pas innée, elle ne se trouve pas en chaque homme dès ça naissance. En ce sens, il convient de se demander de quelle manière elle peut être la nature de l’homme.<o:p></o:p>

                Admettre la culture comme nature de l’homme, c’est affirmer que la culture est l’essence de l’homme. En ce sens, la culture serait innée, l’être qui n’a pas de culture est un être qui n’est pas né avec. Par ce raisonnement, on en déduit qu’il n’est pas humain. Cette thèse est contestable car la culture n’est pas offerte à chaque homme dès la naissance, c’est par l’éducation que l’homme acquiert sa culture, l’exemple de Victor l’enfant sauvage en est la preuve. A première vue, cette enfant de 6 ans retrouvé seul dans la nature n’a presque rien d’humain : il n’est doué d’aucun langage, est associable et ne semble pas avoir conscience de lui-même. Il s’apparente plus à un animal qu’à un être humain, et de plus, s’il était humain, il aurait été naturellement cultivé, or il ne l’est pas. Certains chercheurs en déduisent que Victor n’est pas humain. Pourtant, par des soins attentifs, un chercheur est parvenu à sociabiliser l’enfant, à le rendre humain. Ainsi, l’homme sans culture, « sauvage » sans sa culture ne parait pas humain, mais on ne peut nier son humanité parce qu’il peut acquérir cette culture.. On ne naît donc pas homme, on le devient.<o:p></o:p>

                Si nous ne devenons homme que par l’apprentissage, cela veut dire qu’il existerait une forme innée, naturelle de l’homme, une sorte d’homme animal. En devenant l’homme, cet être naturel passe alors nécessairement d’un état naturel à un état civil, parce qu’il fait l’acquisition d’un savoir. C’est cette opposition des deux états que Jean-Jacques Rousseau énonce dans le Contrat social : « Ce passage de l’état de nature à l’état civil produit dans l’homme un changement très remarquable, en substituant dans sa conduite la justice à l’instinct, et donnant à ses actions la moralité qui leur manquait auparavant. » Ainsi, tout ce qui est considéré comme humain, c'est-à-dire ce que l’on pourrait qualifier de nature de l’homme n’apparaît que dans son état civil. <o:p></o:p>

                L’homme n’est pas cultivé de fait. Un homme qui n’a pas de culture ne peut être un homme si la culture est considérée comme naturel à l’homme. Pourtant un homme sans culture peut acquérir de la culture. La culture elle-même ne peut être la nature de l’homme.




     

                La culture ne peut être la nature de l’homme. Mais l’homme semble plus disposé que d’autres espèces à acquérir cette culture. Aussi, la possibilité que possède l’homme d’apprendre semble être son essence.

                Par notre expérience, nous devons reconnaître que l’homme sauvage tel que le décrit Rousseau n’existe pas dans la nature. De même, lorsque Rousseau évoque cet animal humain à l’état sauvage, il ne fait pas un récit historique à la manière d’un paléontologue, mais il s’agit d’une reconstruction théorique du passage par l’homme de l’état de nature à l’homme civilisé. Si l’on se réfère à Victor l’enfant sauvage, sa capacité d’apprendre démontrée par les scientifiques qui se sont penchés sur son cas,  prouvent une qualité naturelle de l’homme : sa perfectibilité. C’est par ce principe que Rousseau explique le passage de l’état sauvage à l’état de nature. Parce qu’il est naturellement perfectible, face aux difficultés que lui impose la nature dans son état de nature, l’homme doit s’adapter : il lui faut sans cesse et de manière constante répondre à ces difficultés en trouvant un moyen de  les contourner.  « Le désir inné du bien-être et l'impossibilité de contenter pleinement ce désir lui font rechercher sans cesse de nouveaux moyens d'y contribuer. » (Jean-Jacques Rousseau, dans l’Emile). Ce n’est pas la culture elle-même qui semble innée chez l’homme, mais plutôt la capacité perfectionnement, d’acquisition de la culture, autrement dit sa capacité d’apprendre.

                Ainsi, l’éducation paraît être ce qui distingue l’homme de l’animal. Les sciences modernes, et en particulier la génétique, permettent de déterminer scientifiquement les caractéristiques de l’être humain par les informations contenues dans son programme génétique. Si cette branche de la biologie est encore imparfaite, il toutefois possible de supposer que la nature humaine est génétiquement programmé dans notre ADN. C’est dans ce sens que le chercheur François Jacob émet l’hypothèse que ce qui différencie l’homme de l’animal (ce qui est donc la nature de l’homme), est qu’il est génétiquement programmé pour apprendre. On n’éduque pas un animal comme on éduque un enfant, on le dresse. Lorsqu’il est dressé, l’animal sait réagir face à des situations qui peuvent le mettre en danger ou qui lui permettrait d’avoir de la nourriture ou avoir une récompense. C’est parce qu’elle sait qu’il y a un morceau de fromage au bout du labyrinthe que la souris de Daniel Keyes  dans Des Fleurs pour Algernon parvient à surmonter les obstacle. Mais si l’homme est biologiquement un animal, c'est-à-dire qu’il répond à des instincts, des passions qu’il ne peut maîtriser, il est également génétiquement programmé pour apprendre sans limite. Ce qu’il apprend le forme et le rend tel qu’il est. Il y aurait donc une explication génétique et scientifique à la perfectibilité de l’homme avancée par Rousseau.

                Ce qui apparaît être la nature de l’homme enfin, n’est donc pas la culture mais sa perfectibilité, c'est-à-dire sa capacité à apprendre et à s’éduquer. Cette éducation permet à l’homme d’acquérir de la culture et donc de se déjouer par cette acquisitions, des obstacles et des contraintes que lui offre la nature. D’après Rousseau dans Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, ce sont des catastrophes naturelles (inondations, tremblements de terre), qui forcent les hommes à vivre ensemble, ce qui facilite l'établissement de l'usage de la parole. Ce qui est donc la nature de l’homme c’est cette capacité innée qu’il a de se déjouer des contraintes de la nature, et donc nécessairement de s’en éloigner.

                L’homme ne devient homme qu’en apprenant. C’est cette capacité qu’il a de se perfectionner, d’acquérir de la culture, qui fait de lui l’être qu’il est et ainsi de se détacher de la nature. La nature de l’homme semble alors être sa capacité de se distinguer de la nature.

     


               

                L’homme est un animal. Il a beau vouloir s’écarter de la nature par sa culture, il ne peut nécessairement que suivre la nature. On ne peut pas réduire tout être qui peut se perfectionner à la seule humanité.<o:p></o:p>

                En faisant de l’homme un être capable de s’affranchir de la nature, nous faisons de l’homme un être à part de la nature. Nous ne pouvons pourtant faire de la nature humaine une chose distincte de la Nature. Par définition, une nature ne peut être que naturelle. Ce qui est naturel arrive par la force des choses. Or donc, faire de l’homme un être à part, c’est de l’anthropocentrisme, c’est faire de l’homme un être qui vient perturber la nature et, un être qui ne suit pas ses lois. Or d’après Spinoza dans le livre III de l’Ethique, l’homme n’est pas « un empire dans un empire ». L’homme malgré les impressions, ne peut échapper aux lois naturelles parce qu’il en aurait la volonté. La culture ne peut éloigner l’homme de la nature, il la suit nécessairement. Car ce qui arrive arrive nécessairement ; si un évènement arrive, c’est que tous les facteurs qui en sont à l’origine ne pouvaient que provoquer cet évènement. De même, le fait que l’homme acquiert de la culture ne peut être le fruit d’autre chose que la nature elle-même. En apprenant et en se cultivant, l’homme donc ne s’éloigne pas de la nature, il y persiste.  <o:p></o:p>

                En outre, rien ne nous permet de nous distinguer de l’animal. Dire que l’homme est un animal ne peut être contesté. Notre mode de fonctionnement, notre composition, la façon dont nous nous reproduisons ne peut nous classer autre part que parmi les animaux. Aussi, le fait d’être doué de culture éloigne-t-il l’homme de l’animal ? Non, car ce n’est par parce qu’il acquiert de la culture qu’il n’est plus un animal. Je peux améliorer mes conditions de vie, développer un langage complexe et étudier le fonctionnement de la vie, je reste soumis à des facteurs physiques et donc naturels qui me rattache à ma position d’animal. L’homme le plus cultivé du monde ne peut s’empêcher de subir le lot de chaque animal, c'est-à-dire ce qui est commun à tout être humain. Aussi, l’homme ne semble pas être le seul animal perfectible ou doué de culture. Les fourmis par exemple, perfectionnent leur technique de défense (ou d’attaque) selon l’ennemi contre lequel elles se battent. Au même titre que l’homme fait la guerre à ses congénères, la fourmi semble doué de cette même « sociabilité » en se battant contre ses propres congénères d’une fourmilière voisine. Ou bien même, les rapports entre fourmis au sein même d’une fourmilière révèle des caractères sociaux (comme la trophallaxie) qui font de la fourmilière une civilisation. Or d’après Rousseau, c’est parce qu’il acquiert de la culture que l’homme naturel devient civilisé, autrement dit qu’il développe des rapports sociaux avec autrui (que ce soient des rapports conflictuels ou pacifiques). En ce sens, l’homme ne semble pas être l’unique être doué de culture.

                Enfin, ce n’est parce qu’un être est cultivé ou possède la faculté d’apprendre qu’il est humain. Supposons que nous fassions la découverte sur terre ou sur une autre planète d’une espèce jusqu’alors inconnue capable d’apprendre, de communiquer par un système de langage complexe et de se perfectionner en faisant face à des difficultés nouvelles ; en d’autre mots, supposons que nous découvrions une autre espèce douée de culture. En considérant la culture comme la nature de l’homme, nous présupposons donc que la nature est l’essence de l’homme, qu’elle fait de l’homme l’être qu’il est. Or, cette nouvelle espèce que nous découvrons est douée de culture, est-ce suffisant pour la considérer comme un être humain ? Là encore la réalité biologique nous pousse à contester cette considération. Ce qui fait d’un être qu’il appartient à la même espèce qu’un autre, c’est leur homologie génétique qui leur permet entre autre d’assurer une descendance durable. On estime par exemple, que l’homme de Neandertal comme l’homo sapiens, était doué de culture (il enterrait ses morts par exemple). Pourtant, malgré le fait qu’il cohabitait avec l’homo sapiens, la race de l’homme de Neandertal s’est éteinte. Ce n’est donc pas parce qu’il était doué de culture que l’homme de Neandertal était un homme dans le sens où nous l’entendons, c'est-à-dire un homo sapiens.

                On ne peut donc pas considérer la capacité que l’homme a de se perfectionner comme son essence. Cette capacité ne peut non plus l’éloigner de la nature.

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                La culture, parce qu’il s’agit d’une acquisition que fait l’homme durant sa vie, ne peut être sa nature, car elle n’est pas innée. Mais ce qui lui est innée, c’est sa capacité naturelle d’apprendre, de se perfectionner lui-même et en conséquence d’acquérir de la culture. Cette capacité pourrait s’apparenter à une possibilité de s’affranchir de la nature. Il n’en est rien. L’homme ne peut se différencier des autres animaux par sa culture, car non seulement il ne semble pas être le seul être doué de culture, mais aussi parce que cela sous-entendrait que tout être doué de culture serait humain. La culture n’est donc pas la nature humane. Mais faut-il renoncer à l'idée que l'homme puisse avoir une nature ?<o:p></o:p>


    37 commentaires
  • NB : S'agissant d'une dissertation d'un étudiant (et non pas d'un philosophe ou professeur de philosophie), je vous conseille de prendre du recul vis-à-vis de ma "production". Si le coeur vous en dit, vous pouvez réagir et faire votre propre réflexion, je me ferai un plaisir de la publier.

    Dissertation de philosophie politique:

    "L'Etat est-il l'ennemi de l'individu?"

    « L’Etat est-il l’ennemi de l’individu ? ». Il peut paraître déplacer de se poser cette question dans la mesure où l’Etat occupe une place importante dans la vie de tous les jours. Pourtant, contrairement à l’individu, l’Etat est une notion artificielle crée par l’homme à travers des accords signés avec ses semblables. De plus, l’objectif de l’Etat n’est pas anodin : il s’agit de réduire la nuisibilité d’autrui sur l’individu ; or autrui n’est autre que l’ensemble des autres individus. L’Etat apparaît donc comme nécessairement un obstacle à l’épanouissement total de l’individu. Il s’agit donc d’une situation paradoxale où l’Etat est protecteur mais également réducteur de l’individu. Faut-il ainsi penser que l’Etat est le geôlier le l’individu ?


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                L’individu ne connaît pas naturellement l’Etat. L’état de nature est un état de guerre permanent et la création de l’Etat par un pacte social permet de mettre fin à ce règne de la violence.

                Si l’Etat peut être considéré comme l’ennemi de l’individu, il convient donc de se demander ce qui pousse les hommes à vivre dans une société étatique. Pour Hobbes dans le Léviathan, la nature humaine a trois caractéristiques. Tout d’abord tous les individus sont plus ou moins égaux quant à leurs facultés ; chacun a donc le même espoir d’atteindre ses fins et si deux individus désirent le même bien, cette absence de supériorité les poussera à la rivalité et donc au conflit. Ensuite, Le désir qui domine chez lui est sa sécurité, c'est-à-dire se conserver soi-même. Il en résulte que chaque individu à pour plus forte passion la crainte de mourir violemment, chaque individu cherche donc le pouvoir pour ne pas être menacé par autrui. Enfin, chaque individu éprouve le désir de se glorifier et au moindre signe de mépris, il se sentira agressé et désirera se venger. L’état de nature ne peut ainsi être autre chose que la guerre civile. Or cet état de « guerre de chacun contre chacun » accentue la crainte de la mort et l’homme se doit d’attaquer pour ne pas être attaqué. Il s’agit donc d’un état contradictoire où l’individu risque la mort en cherchant la sécurité. Ainsi, pour Hobbes, le contrat social d’impose comme le passage de l’état de nature à l’état civil. Pour sortir de cet état de guerre qu’est l’état de nature, chaque individu doit pour sa sécurité dessaisir son droit naturel, c'est-à-dire sa capacité à assurer lui-même sa défense, à faire justice lui-même, au profit d’une constitution. Cette constitution que Hobbes nomme le Léviathan qui hérite de la force commune.

                Cette idée que le pacte social a pour objectif d’assurer la sécurité des individus est reprise par Rousseau. Ce dernier ne considère pas l’état de nature comme état de guerre permanant. Au contraire, même si l’individu a un désir de conservation du fait de son amour propre, l’homme est capable de pitié qui vient contrebalancer son amour propre. A l’état de nature les hommes ne cherchent donc pas la rivalité, ils préfèrent la solitude à la communauté. Il ne peut y avoir de guerre. Seulement, les individus ne peuvent s’éviter éternellement. En effet, l’homme peu à peu va développer passions et possessions jusqu’à ce que la terre soit totalement conquise. Ainsi s’opposent ceux qui possèdent de la terre et ceux qui n’en possèdent pas, et la guerre risque d’éclater. Mais ce sont ceux qui possèdent une terre qui risque le plus en cas de guerre, car non seulement ils risquent de perdre leur terre mais aussi leur vie. A l’opposé, ceux qui n’ont pas de terre sont de toute manière menacés par la mort dans les deux cas : sans terre ils ne peuvent pas se nourrir et donc ne peuvent pas survivre. Ce sont donc les riches qui vont instaurer le contrat social pour assurer leur sécurité. Ainsi, chacun accepte de se défaire de son droit naturel au profit d’une force commune qui a pour but d’assurer la sécurité de chacun. <o:p></o:p>

                L’Etat apparaît donc comme une entité au service de l’individu au sens où il en assure la sécurité. En effet, comme tous les individus signent le pacte social et se défont de leur droit naturel et le confient à l’Etat. Ce droit, celui de rendre justice, ne peut être ainsi utilisé que par l’Etat lui-même qui seul exerce le droit. La peur de la sanction doit alors être supérieur au profit qui pourrait être tiré d’un délit. Ainsi l’Etat doit être suffisamment puissant pour contraindre les hommes à ne pas s’entretuer, et doit assurer la cohésion de chaque membre de la société. Pour Hobbes, seul un Léviathan, c'est-à-dire un « monstre de puissance » peut garantir la défense des individus. Seule une toute puissance incontestée capable d’empêcher les individus de se retourner contre leur état de nature et d’engendrer la guerre. Ce Léviathan est le pouvoir absolu qui donc assure la protection de l’espèce humaine. En ce sens, l’Etat ne peut être considéré comme l’ennemi de l’individu.

                L’Etat n’est ainsi  pas l’ennemi de l’individu, dans la mesure où ce dernier fait appel à celui-ci pour s’assurer sa protection. La constitution d’un Etat fort permet à l’individu d’assurer sa passion dominante qui est celle de sa propre conservation.

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    L’Etat puissant ainsi instaurer peut connaître malheureusement différents dérapages qui viennent mettre en doute le rôle unilatéralement protecteur de l’Etat sur l’individu.

    En cédant tous ses droits à la représentation étatique, l’individu se soumet au risque de se voir nié par l’Etat lui-même. C’est le cas des régimes totalitaires qui paradoxalement s’appuient sur les individus eux-mêmes pour les réduire au plus haut point. Comme le dit justement Hobbes, le Léviathan ne peut persister à la tête de l’Etat s’il n’agit que dans son propre intérêt. Il se doit alors de flatter les individus de la société pour les maintenir sous sa botte. Pour Platon, dans le Gorgias, la rhétorique est justement un « savoir-faire » parmi d’autre pour que le tyran arrive à ses fins : la rhétorique est une flatterie qui offrent aux individus ce qui leur paraît le plus agréable et non pas ce qui est le meilleur pour eux. Il s’agit d’une tromperie qui rend le démagogue incontournable et lui donne une influence considérable sur la masse de non-spécialiste. Ceux-ci croiront plus l’orateur que le spécialiste qui détient le juste. Le démagogue peut donc faire passer aux yeux de la masse d’individus l’injuste pour le juste ; tyran peut ainsi maquiller son intérêt personnel, ou celui d’un certain groupe social, en intérêt général. Les individus ont ainsi perdu ce qui faisait leur essence, c'est-à-dire leur liberté vis-à-vis de l’Etat : ils sont manipulés et ne sont plus libres. Ils sont trompés dans leurs choix par une fausse connaissance que leur délivre l’Etat. George Orwell dans 1984 peint un exemple de cet Etat totalitaire.

    L’Etat peut devenir un ennemi de l’individu même dans le cas où il cherche à satisfaire la sécurité totale des individus. En effet, comme le démontre Ira Levin dans son roman contre-utopique un Bonheur insoutenable, l’Etat, même en cherchant à satisfaire le plus parfaitement possible le désir de sécurité des individus (celui-là même qui est à l’origine de la création de l’Etat), risque de porter atteinte à la souveraineté individuelle. Levin présente une société vierge de tout conflit, dont les membres sont comme vaccinés de toute trace de sentiment belliqueux par un traitement hormonal. Cette société est gouvernée par un ordinateur (lui-même sous le contrôle permanent d’une élite soucieux de maintenir la paix entre les hommes), qui organise la vie de tous les membres qui ne connaissent plus ni le chômage, ni toute autre forme d’inégalité. Le problème que pose l’auteur est celui-ci : les membre de cette société ne sont plus des individus, et n’ont plus rien qui fasse d’eux des individus ; la guerre ne peut-elle pas paraître préférable à une société où l’être humain n’existe plus ?<o:p></o:p>

                Ainsi, pour des auteurs comme Bakounine « l’Etat est (…) la négation la plus flagrante, la plus cynique et la plus complète de l’humanité. Il rompt l’universelle solidarité de tous les hommes sur la terre, et n’en associe une partie que pour en détruire, conquérir et asservir tout le reste ». Pour Rothbard dans l’Ethique de la liberté, les individus possèdent un droit de propriété naturelle sur leur propre personne ; l’idée même d’Etat devient alors illégitime. La sécurité des individus peut être assurée du moment que les libertés des individus sont respectées. Et l’Etat n’est pas la seule entité à avoir le pouvoir de garantir ces libertés. En effet, « la loi naturelle du marché », de l’offre et de la demande, serait pour Rothbard une façon de satisfaire les individus sans atteindre leur droit. En effet, le bien pour chaque individu réside dans la concurrence juste entre les individus et chaque individu doit naturellement entretenir cette liberté d’entreprendre car il en va de son avantage (plus la concurrence est grande plus  les prix sont bas). En cas de viol des droits naturels, ils seraient de l’intérêt des individus de réprimer eux-mêmes ce genre d’agissement.

                L’Etat ne peut être l’assurance définitive d’une sécurité de l’individu. En confiant ses droits à l’Etat, l’individu à semble-t-il créé une puissance artificielle plus dangereuse que la rivalité entre chaque individu. Il semble qu’il soit préférable pour l’homme de vivre sans Etat et de ne pas voir sa situation d’individu niée.

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                L’individu peut donc vivre sans Etat puissant qui risquerait de le nuire plus fortement qu’autrui. Mais, la constitution d’un Etat paraît être une étape nécessaire au développement des communautés.<o:p></o:p>

    Hume considère qu’il n’est pas nécessaire d’établir un contrat social pour permettre à une communauté d’exister pacifiquement. Il admet néanmoins que l’homme est naturellement égoïste : il s’agit d’un égoïsme au sens élargi car l’individu veut satisfaire son intérêt personnel ou celui de ses proches. Cet égoïsme est facteur de conflit entre les hommes, car si un individu d’un clan A vole un individu d’un clan B, c’est tout le clan B qui se retourne contre le voleur ; celui-ci quoiqu’il arrive lui sera protégé par son propre clan, il y aura nécessairement conflit en cas d’injustice. Mais comme Hume le dit lui-même dans le Traité de la Nature humaine : « Il n’est pas de passion capable de contrôler cette disposition intéressée sinon cette même disposition, par un changement d’orientation ». Autrement dit, l’homme cherchera toujours à défendre son propre intérêt, et pour défendre son propre intérêt il doit nécessairement restreindre son égoïsme. « J’observe qu’il sera dans mon intérêt de laisser autrui en possession de ses biens, pourvu qu’autrui agisse de la même manière à mon égard ». Ainsi les différents clans mettent en place des règles qui appliquent à une transgression une compensation correspondante. Il y a donc formation d’un droit commun sans nécessairement création d’un état. Entre le Xe et le XIVe siècle, l’Islande fonctionnait dans une société analogue, où il existait trois condamnation : l’amende, la proscription pendant trois ans et la proscription à vie. Ce genre de société ne fonctionne que dans des petites sociétés. En grandissant, une seule injustice ne suffit plus à provoquer la guerre, la tentation de l’injustice se renforce donc nécessairement. L’égoïsme doit non seulement produire une règle de justice qui le restreint mais aussi former un gouvernement qui le contraint à obéir aux lois. Ainsi, même si l’Etat n’est pas établi par un contrat social, il est nécessaire pour limiter l’individualisme des individus lorsque la société grandit.

    L’Etat apparaît ainsi comme nécessaire et naturel à toute société humaine qui se complexifie. Seulement cet Etat, comme nous l’avons vu précédemment peut se retourner contre l’individu. Il s’agit alors d’établir une constitution valable qui ne fait pas de l’Etat l’ennemi de l’individu. En ce sens, l’individu doit servir l’Etat et l’Etat doit servir l’individu. C’est cet Etat que Rousseau construit dans le Contrat social. Ce contrat social que les individus signent vise à « l’aliénation totale de chaque associé avec tous ses droits à toute la communauté ». Ainsi, « chacun se donnant à tous ne se donne à personne », en d’autre termes, Tous les individus abandonnent leur liberté afin de l’offrir non pas à un individu particulier comme cela pourrait être dans une société totalitaire, mais à la communauté toute entière. Aucun groupe social ne peut l’emporter étant donné qu’elle est entre les mains de la société composée de tous ses membres. En effet, la communauté est une entité composée de l’ensemble des individus de la société à qui elle rétrocède des droits. Chaque loi est décidée par l’ensemble des individus qui forment le peuple. Ces citoyens ont offert tous leurs droits fondamentaux à l’intérêt général, ils ne sont plus des individus (au sens où ils n’œuvrent que pour leur propre survie) mais sont désormais des citoyens. Quand la communauté, c'est-à-dire l’Etat demande au citoyen de voter une loi, celui-ci ne peut plus résonner dans son intérêt propre, mais dans celui de la communauté. Cette loi doit être conforme à l’intérêt général. Si les citoyens refusent d’œuvrer pour l’intérêt général, ils se condamnent à un retour à la guerre civile. L’Etat né de ce contrat social est donc l’ennemi non pas de l’individu, car chaque citoyen possède désormais des libertés assurées par l’Etat lui-même, mais de son individualisme.

    L’Etat est ainsi nécessaire dans la complexification d’une nation. Elles aussi un ennemi de l’individu au sens où l’individu, en privilégiant ses intérêts propres, menace l’Etat qui doit maintenir la sécurité de ses membres. En retour, l’Etat, pour fonctionner correctement se doit d’être l’ennemi de l’égoïsme des individus, qui deviennent désormais des citoyens.<o:p></o:p>

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                L’Etat n’est pas créée pour être l’ennemi de l’individu. Au contraire, il en est le protecteur dans le sens où il le protège de toute violence qui pourrait venir d’autrui à l’encontre de l’individu. Mais, s’il protège l’individu des autres individus, il peut au contraire nuire à l’ensemble de la communauté. Il ne faut pas néanmoins le considérer comme une entité naturellement mauvaise pour l’homme dont on pourrait se passer. En se complexifiant, la société a besoin de règles ; l’Etat apparaît nécessairement lorsque la société s’agrandit. Son objectif n’est pas l’éradication de l’individu, il reste néanmoins l’ennemi de l’individu égoïste, soucieux uniquement de son intérêt personnel ou de celui de son clan. L’Etat est donc l’ennemi de l’individu : il le détruit au profit d’un être nouveau, débarrassé de son individualité le plus préjudiciable, dont il doit assurer néanmoins les droits fondamentaux. Cet être est le citoyen soucieux de l’intérêt général et non plus de son intérêt propre.


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